Du 10 et le 14 juillet, le GIIF, en collaboration avec Gallagher Re, a organisé une tournée d'étude au Maroc dans le cadre d'un programme de renforcement des capacités destiné aux acteurs du secteur public et privé travaillant sur des produits d'assurance indicielle basés sur l'agriculture dans les pays francophones d'Afrique de l'Ouest. L'objectif global de ce programme est d'évaluer les principaux défis liés au développement de l'assurance agricole en Afrique de l'Ouest et d'identifier les solutions les plus prometteuses pour y remédier.
Cette tournée d'étude, l'échange de partage des connaissances Sud-Sud a réuni des participants du Burkina Faso, de la RDC, du Niger et du Sénégal. Les objectifs étaient d'informer les participants sur l'avancement des travaux analytiques du programme, d'analyser les opportunités pour tirer parti des marchés privés et des solutions d'assurance afin de renforcer les fonds de solidarité publics, et d'apprendre des expériences marocaines en matière de fonds de solidarité, d'analyse des risques climatiques, d'assurance et de partenariats public-privé. En définitive, l'objectif est d'établir des opérations futures potentielles dans ces pays en ce qui concerne les solutions liées aux risques climatiques.
L'échange Sud-Sud a réuni 13 participants. Des rencontres ont été organisées avec le Ministère des Finances, le FSEC (Fonds de Solidarité contre les Événements Catastrophiques), l'ACAPS (Autorité de Contrôle des Assurances et de la Prévoyance Sociale), la SCR (Société Centrale de Réassurance) et la FMSAR (Fédération Marocaine des Sociétés d'Assurances et de Réassurance). Pour offrir une vue d'ensemble de l'échange d'informations entre les participants, voici quelques commentaires reçus de la part des délégations.
Selon Saïdou Sankara, Président du Comité Technique du Conseil National de la Sécurité Alimentaire du Burkina Faso: “En ce qui concerne le Fonds d’appui à la sécurité alimentaire (FASA), les enseignements tirés de ce voyage d'étude peuvent être utilisés pour améliorer la préparation du Burkina Faso a une gestion plus efficace des actions de réponse à l’insécurité alimentaire et nutritionnelle dans le pays. Il ajoute: “Pour l’assurances agricole, les expériences acquises au cours de ce voyage permettent: i) d’analyser davantage les risques agricoles et d’identifier ceux qui sont assurables et proposer un mécanisme de mitigation de ceux qui sont non assurables; ii) de renforcer le cadre de gestion des risques agricoles en tenant compte de tout les parties prenantes et en élaborant collectivement la ou les meilleures stratégies pour faire face à ces risques; et iii) de mettre l’accent sur la collecte des données fiables pour avoir une chance d’être pris en compte sur le marché de la réassurance. »
L'équipe du GIIF a également interrogé l'équipe de Gallagher Re - Secteur Public, Résilience Climatique et Solutions Paramétriques Global Practice, pour recueillir ses avis:
GIIF: Comment résumeriez-vous le programme global et son impact potentiel sur les acteurs des secteurs public et privé?
Gallagher Re: À travers ses différents piliers, le programme vise à renforcer la capacité et, en fin de compte, la réponse financière aux catastrophes dans les pays d'Afrique de l'Ouest. Le programme souligne l'importance et le rôle des acteurs publics et privés dans la chaîne de valeur et l'écosystème de financement des risques de catastrophe. Le premier pilier du programme se concentre sur les solutions au niveau micro. Il identifie les goulots d'étranglement critiques et formule des recommandations pratiques pour développer l'assurance agricole au Niger, au Burkina et au Sénégal. Le deuxième pilier du programme vise à soutenir les autorités d'un pays d'Afrique de l'Ouest dans la réalisation d'un diagnostic sur le financement des risques de catastrophe et l'élaboration d'une vision stratégique pour renforcer la réponse financière souveraine existante aux catastrophes, en complément de la solution d'assurance micro privée. Les deux piliers seront soutenus par une série d'événements de renforcement des capacités et de formation destinés aux acteurs publics et privés des pays d'Afrique de l'Ouest.
GIIF: Dans le cadre de ce programme de renforcement des capacités, nous constatons qu'il existe un volet de formation spécialement conçu. Pourriez-vous nous fournir des détails sur l'objectif, le contenu et les résultats attendus de cet événement de formation ?
Gallagher Re: Le volet de renforcement des capacités et de formation vise à fournir aux participants une compréhension complète des dernières technologies, données et analyses qui peuvent être utilisées pour améliorer l'assurance agricole en Afrique de l'Ouest. La formation vise à fournir aux régulateurs d'assurance et aux compagnies d'assurance des informations sur la mise en œuvre de produits d'assurance agricole rentables et efficaces en Afrique de l'Ouest. Le volet de formation comprendra des modules couvrant toute la chaîne de valeur, y compris les principes fondamentaux du financement des risques de catastrophe, l'accès aux données, la conception et la tarification des produits d'assurance agricole, ainsi que la gestion des sinistres et les systèmes de paiement. Il couvrira également les derniers développements en matière de transfert de risques paramétriques et sa croissance et son application réussie dans divers contextes et applications nationaux, allant du déficit de récolte à l'interruption d'activité et aux pertes de revenus.
GIIF: Au cours de cette tournée d'étude et de vos interactions avec les délégations, avez-vous recueilli des informations surprenantes, intéressantes ou inattendues ? Comment envisagez-vous que cet événement influence les activités du programme en cours ?
Gallagher Re: Les pays représentés par les différentes délégations sont à des stades différents de leur réponse financière aux catastrophes climatiques, y compris à l'assurance agricole. La tournée d'étude a permis aux délégations de découvrir les différents acteurs publics et privés de l'écosystème de financement des risques de catastrophe du Maroc, notamment le Ministère des Finances, l'Autorité de l'Assurance, le Fonds de Solidarité FSEC, la Fédération Marocaine des Assureurs et le Réassureur National. En tirant parti des synergies créées par un partenariat public-privé, tous les acteurs ont contribué directement ou indirectement à améliorer le cadre juridique et institutionnel, l'analyse et la modélisation des risques catastrophiques, et finalement à développer le mécanisme double d'assurance contre les risques de catastrophe, visant les populations vulnérables et assurées. Nous pensons que cette tournée d'étude a contribué, de manière concrète, à sensibiliser et à mettre en évidence les avantages d'une meilleure compréhension des risques et de la disponibilité des données dans les pays d'Afrique de l'Ouest, ainsi qu'à montrer comment ils sont essentiels pour hiérarchiser, cibler et optimiser l'utilisation des fonds publics et des solutions de transfert de risques. Elle a également permis de démontrer les synergies potentielles entre les secteurs public et privé et les avantages en matière de résilience climatique et financière aux niveaux macro, méso et micro. Les messages clés et les enseignements ont été illustrés par des expériences réelles et des cas concrets au Maroc, permettant aux participants de poser des questions et d'apprendre directement de leurs pairs. Tout cela contribuera à développer une approche pratique des tâches à venir pour ces pays et facilitera l'adoption et la mise en œuvre des différentes recommandations à être livrées dans le cadre de ce programme.
Pour suivre sur le point ci-dessus, concernant les informations recueillies auprès des participants, M. Abdou Thiam, Directeur de la Coopération et des Partenariats au Fonds National de Solidarité du Sénégal, a ajouté que “L’expérience du marché marocain pourrait nous aider à travailler davantage à la collecte des données nécessaires à la modélisation, mais également à mettre en place un système de taxation sur les assurances pour financer les activités du FSN contre les risques de catastrophes au Sénégal.”
Selon Monsieur Roland Yahaya, cadre à la direction du Contrôle des Assurances au Ministère des Finances du Niger, l'un des points forts majeurs de la tournée d'étude était la prise de conscience que “Nos pays sont en proie à des phénomènes naturels cycliques (sécheresse, inondations...) souvent très dommageables et c'est pourquoi les enseignements tirés doivent être capitalisés et dupliqués afin de bien mener le processus de mise en place et du financement de l'assurance agricole en cours au Niger et au delà la solidarité nationale pour une gestion des évènements catastrophiques efficace. Pour ce faire, il faut de la volonté politique et une implication active des acteurs publics et privés comme cela a été le cas au Maroc.”En ce qui concerne les principales prochaines étapes pour la délégation du Niger, il a ajouté: i) la mise en place d'un comité de constitution de la société nationale et l'opérationnalisation de l'assurance agricole ii) La formation et la sensibilisation de toutes les parties prenantes iii) La mise en place et le renforcement de l'infrastructure des données iv) La constitution d'un comité d'experts spécialisés pour concevoir la stratégie de financement des risques de catastrophes, en vue de la création d'un Fonds dédié, à l'image du FSEC.
C'est une période potentiellement transformative pour le secteur agricole de la région, visant à soutenir l'amélioration de la durabilité, de la résilience et de la protection des moyens de subsistance des agriculteurs et des plus vulnérables. Nous sommes convaincus que les connaissances et les perspectives acquises lors de cette tournée d'étude joueront un rôle crucial dans la définition des futures opérations en matière d'assurance agricole. Nous espérons que les enseignements tirés des expériences marocaines, ainsi que l'analyse des opportunités d'utiliser les marchés privés et les solutions d'assurance, contribueront à élaborer des stratégies efficaces pour faire face aux défis identifiés.
Nous remercions tous les participants qui nous ont accompagnés pendant la tournée d'étude, l'équipe de Gallagher Re qui a mis en place un programme complet et qui a apporté des contributions précieuses, ainsi que les représentants des pays interrogés ci-dessus pour leur contribution à cette newsletter.